Horloge astronomique de Prague

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INTERET DE L‘HORLOGE ASTRONOMIQUE DE PRAGUE L’horloge pragoise est un monument médiéval unique. Elle fut élaborée au cours de la période qui marqua le déclin progressif du rayonnement culturel des pays tchèques, ce rayonnement ayant eu pour origine le règne de Charles IV, roi tchèque et empereur du Saint-Empire romain germanique, qui érigea Prague en centre de connaissances, de culture et de pouvoir en Europe. De son temps, l’horloge de la Vieille Ville fut construite comme l’une des dernières horloges médiévales archaïques. Celles-ci avaient une autre finalité et présentaient d’autres caractéristiques que les horloges des temps modernes, créées en Europe dans le sillon de la Renaissance. Leur cadran principal – l’astrolabe – n’était pas conçu comme un instrument astronomique d’une précision sans faille, mais était élaboré à des fins notamment astrologiques. Le principe de sa construction se situe à l’opposé de celui des astrolabes astronomiques. A la différence de la majorité des horloges de ce temps, bâties essentiellement à l’intérieur des églises, l’horloge pragoise fut délicatement insérée entre les piliers de soutènement de la tour de la mairie de la Vieille Ville. Elle est tournée vers l’espace extérieur, vers la place, elle indique le temps et les données astrologiques, en s’intégrant ainsi à la vie du centre-ville de Prague, désignée souvent

QU’EST-CE QUE L‘ASTROLABE RECELE-T-IL ? Le mouvement des corps célestes Le panneau de l’astrolabe présente une vue du ciel dans la direction du sud. En bas, une ligne dorée marque l’arc de l’horizon ; au-dessus de lui évoluent dans le ciel, de la même façon que dans la nature, à savoir de gauche à droite, le Soleil, la Lune et les étoiles. Celles-ci sont représentées par des constellations qui figurent sur un cercle excentrique.

comme le « cœur de l’Europe ». En exagérant un peu, on peut dire que l’horloge se trouve au centre même du continent européen. L’horloge de la Vieille Ville est une œuvre complexe, l’ensemble est composé de différentes couches superposées. Le décor sculptural et panneau sur lequel est peint le calendrier complètent l’élément central de l’horloge, à savoir son cadran supérieur : l‘astrolabe. L’astrolabe de l’horloge médiévale représente le ciel, figure tournante, sur laquelle évoluent le Soleil, la Lune et les étoiles et qui est également la maison de Dieu. L’homme du Moyen-Age percevait l’horloge comme un vrai miracle. Elle le surprenait par la capacité de son créateur de comprendre les mouvements du Soleil et de la Lune dans le ciel et de les imiter. Son astrolabe permettait à chacun de lire toute une série de données : l’heure qu’il fait, le jour de l’année, de voir dans quelle mesure l’interaction entre le ciel, les étoiles, le Soleil et la Lune était favorable à la vie d’un individu. L’horloge arbore également des signes astrologiques. L‘astrologie et la croyance que les affaires sur Terre sont commandées depuis le ciel, comptaient beaucoup dans la vie de ces temps, elles semblaient évidentes. Elles permettaient de prédire l’avenir ou de déterminer le moment propice pour mettre en œuvre telle ou telle décision importante, de bien programmer des procédures thérapeutiques.

De la même façon qu‘à la fin du printemps et au début de l’été, lorsque le Soleil est situé très haut dans le ciel, celui-ci parcourt un grand arc de cercle de gauche à droite sur le pourtour de l’astrolabe. Il en est tout autrement en hiver : l’orbite du Soleil est très basse dans le ciel de même que sur le panneau de l’astrolabe. La représentation de la sphère céleste n’est que partielle : on découvre ainsi les constellations du zodiaque que le Soleil et la Lune traversent au cours de l‘année. Le Soleil parcourt tout le pourtour du zodiaque

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ZOOM SUR LES ELEMENTS SCULPTURAUX EN PIERRE Sur la face extérieure de l’horloge se trouvent des éléments sculptés d’un grand raffinement. Ils proviennent notamment de l’époque où des aménagements dans le style de gothique tardif furent réalisés et représentent de nombreux thèmes typiques de l’architecture d’époque : masques fantastiques, personnages singuliers, représentants du règne animal réel ou mythologique (singe, chat, chien, grenouille, hibou et d’autres animaux).

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en une année, comme il le fait dans le ciel, la Lune en moins de 27,5 jours. Le Soleil et la Lune évoluent très lentement sur le cercle du zodiaque dans le sens opposé à celui des aiguilles d’une montre ; accompagné du Soleil et de la Lune, le Zodiaque tourne au sein de l’astrolabe en faisant une révolution par jour dans le sens des aiguilles d’une montre. Dans la partie inférieure de l’astrolabe, sous la ligne de l’horizon, on observe la surface terrestre autour de nous. La couleur rouge en-dessous de l’horizon représente l’aurore, la couleur du ciel avant le lever du Soleil, et le crépuscule, à son coucher. La couleur finit par se fondre dans la nuit sombre, représentée par un cercle noir.

Les quatre sortes d’heure différentes Depuis toujours, le cadran – astrolabe présente les mouvements du Soleil, de la Lune et des étoiles dans le ciel, mais il indique également l’heure. Dans la journée, à savoir depuis le lever jusqu’au coucher du Soleil, le symbole doré par lequel il est incarné, assorti d’une aiguille également dorée, indique l’heure en se mouvant sur l‘astrolabe ; c’est une heure inégale, dite planétaire. Toute la journée et toute la nuit, l’aiguille dorée indique également ce qu’on appelle l’ancienne heure tchèque que l’on commence à décompter à partir du coucher du Soleil. A la limite du pourtour de l’astrolabe, cette heure est marquée à l’aide de chiffres gothiques de 1 à 24, reportés sur un cercle tournant. Composée de vingt-quatre unités de la même durée, cette heure singulière nous vient d’Italie, c’est l’empereur Charles IV qui la fit découvrir au pays cinquante ans avant la construction de l’horloge. Celle-ci indiquait le découpage naturel de la journée, dénommé initialement l’heure italienne, et plus tard aussi l’ancienne heure tchèque, à l’aide d’une main qui se déplaçait sur le cadran solaire, mais aussi par le nombre de coups de sonnerie d’un cymbalum. Ainsi le son de l’heure se répandait-il à travers les rues de la Vieille Ville.

L’horloge continue à indiquer l’ancienne heure tchèque. Jusqu’à l’incendie de l‘horloge en mai 1945, celle-ci sonnait l’heure exacte indiquée par le nombre des coups. Pour l’accompagner, à chaque ancienne heure tchèque entière, et jusqu’au coucher du Soleil, un défilé des apôtres se mettait en mouvement. Aujourd’hui, les apôtres passent derrière de petites fenêtres qui s’ouvrent à l’heure entière ordinaire, l’heure d’Europe centrale, et le nombre d’heures est indiqué par la sonnerie. L’ancienne heure tchèque continue à être indiqué par la vieille sonnerie, l’horloge de la Vieille Ville est ainsi aujourd’hui la seule tour-horloge de Prague à battre 24 coups à minuit au lieu de 12. A minuit, les apôtres ne défilent plus derrière les fenêtres, le dernier passage a lieu à onze heures du soir ; ils profiteront ensuite du repos bien mérité jusqu’à neuf heures du matin. En plus de l’ancienne heure tchèque, calculée depuis le coucher du Soleil, le soleil de l’horloge indique également l’heure comptée depuis le lever du Soleil jusqu’à son coucher. En tout, il s’agit de douze heures. Elles sont marquées par des chiffres arabes allant de 1 à 12 et divisent la journée en douze intervalles identiques. On l’appelle heure planétaire ou bien l’heure temporaire, babylonienne ou juive, mais aussi l’heure inégale. L’appellation « heure inégale » correspond à la différence de durée d’une journée entre l’hiver et l’été. En hiver, autour du solstice d’hiver, le Soleil se lève vers huit heures d’Europe centrale et se couche vers seize heures. Le jour solaire ne dure donc que huit heures ; un douzième de la journée depuis le lever jusqu’au coucher du Soleil, à savoir une heure planétaire, ne fait que quarante minutes en hiver. En été, la même heure inégale ou planétaire a une durée double, à savoir quatre-vingt minutes. Car en été, le Soleil se lève à quatre heures du matin pour se recoucher à huit heures du soir. L’heure planétaire fut également utilisée à des fins astrologiques. Chacune des heures planétaires était dédiée à une autre planète. Mais celle-ci changeait régulièrement tous les jours de la semaine et un écriteau placé

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au-dessus des fenêtres des apôtres marquait la planète régnante. La position du Soleil sur l’horloge permettait d’élaborer des prévisions astrologiques par rapport aux évènements terrestres, de déterminer la période idoine pour les procédures thérapeutiques, telles que les saignées, jadis particulièrement recherchées et pratiquées. L‘astrologie faisait partie de la vie courante, et même si elle était en principe contraire à la théologie chrétienne, l’Eglise la tolérait plus ou moins. Elle fut reconnue et pratiquée par certains dignitaires de la religion catholique. Depuis les années 1550, l’horloge indique également l’heure locale telle qu’elle est utilisée aujourd’hui, à savoir douze heures comptées depuis minuit et autres douze heures commençant à midi. Elle est marquée par les chiffres romains dorés sur le pourtour de l‘astrolabe. Depuis son apparition sur l’horloge, cette heure est aussi appelée « allemande » ou de « demi-horloge ». Dès 1865, l’horloge indique également le temps sidéral. Le temps sidéral est une

donnée utilisée dans l‘astronomie. Il est marqué de manière plutôt discrète, par une petite étoile dorée placée sur le zodiaque. Celle-ci tourne autour de l’astrolabe en un jour sidéral, à savoir en 23 heures et 56 minutes. Le temps sidéral est ensuite calculé selon le point vernal, lorsque l’étoile est au plus haut de sa trajectoire, devant le chiffre XII. Ainsi, au cours de sa révolution, l’étoile montre progressivement les premières douze heures, en tournant sur les chiffres romains dorés situés sur la partie droite de l‘astrolabe, de la même façon que l’aiguille dorée montre l’heure de demi-horloge ; il faut ensuite rajouter aux chiffres I à XII sur le côté gauche la valeur de douze, à savoir le nombre de toutes les heures de la première moitié du jour sidéral. L’étoile dorée montre l’emplacement dans le ciel où se trouve le Soleil sur sa trajectoire exactement au moment de l’équinoxe de printemps, donc autour du 20 mars. Le temps sidéral indique ainsi la position du ciel étoilé par rapport à l’observateur qui se trouve dans un endroit précis sur Terre, en l’occurrence à Prague.

TABLEAU DES SYMBOLES RATTACHES AUX CORPS CELESTES Autrefois, ce tableau faisait partie de l‘horloge. Il indiquait la planète qui gouvernait une heure en particulier et avait ainsi une signification astrologique. Soleil Vénus Mercure Lune Saturne Jupiter Mars

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DESCRIPTION DE L‘ ASTROLABE DE L‘HORLOGE Le cadran astronomique de l’horloge de Prague montre quatre types d’heure. Les chiffres gothiques sur son pourtour (1) servent à compter l’ancienne heure tchèque, montrée par l’aiguille dorée (A). Les chiffres arabes sur une surface bleue (2) montrent l’heure planétaire, marquée par le point d’intersection de l’aiguille du Soleil (B) et du pourtour extérieur du zodiaque. Les chiffres romains (3) servent à marquer l’heure de demi-horloge et le temps sidéral – l’heure de demi-horloge est indiquée par l’aiguille dorée (A), le temps sidéral est indiqué par l’étoile dorée (C).

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CALENDRIER En plus du grand astrolabe circulaire portant les chiffres de l’ancienne heure tchèque, dont le pourtour extérieur mesure 306 cm, l’horloge comporte aussi un plus petit panneau, dont le diamètre est de presque 270 cm et qui est placée un peu plus bas. Le panneau représente un calendrier tournant. Dès l’origine, il indique à quel saint chacune des journées est dédiée. Les noms des saints sont inscrits sur le pourtour du panneau, chaque nom est assorti du nombre de jours dans le mois, de la lettre dominicale ainsi que de la syllabe de cisiojanus. La lettre dominicale permettait de connaître le jour de la semaine. Sur le calendrier, les différents jours sont marqués par les lettres allant de a à g. Il suffisait de voir sur quel jour tombait le premier dimanche après le Nouvel an et quelle lettre figurait à cette date au mois de janvier, parce que celle-ci allait ensuite marquer tous les dimanches pendant toute l’année sur le

panneau du calendrier. Cisiojanus est un texte en vers qui permettait, après mémorisation, de repérer facilement les dates anniversaires des saints majeurs ainsi que les journées importantes de l‘année. Le panneau du calendrier prit la forme actuelle en 1866. Le calendrier précédent portait notamment les noms des saints, car la date correspondait à l’époque à la fête du plus important parmi eux. L’acte édité par le bourgmestre, annonçant la construction de l’horloge par Mikuláš de Kadaň en 1410, porte l‘indication « le jeudi précédant la Saint-Gall ». L’horloge porte aujourd’hui un calendrier peint en 1866 par Josef Mánes ; pour être précis, il s’agit d’une copie. Josef Mánes fut un peintre tchèque renommé, il est né en 1820 dans le quartier de la Vieille Ville. Représentant du romantisme tchèque, il fut le père fondateur de l’art national tchèque qui servit un peu plus tard de modèle à la génération des peintres du Théâtre national. L’original de son calen-

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drier se trouve maintenant au sein du Musée municipal. Le tableau peint par Mánes remplaça le panneau précédent dont on trouve l’évocation sur la gravure de Wilhelm Kandler, réalisée d’après un dessin d‘Alois Czermak datant de 1836. Nous pouvons rajouter que Josef Mánes réalisa le calendrier même si l’honoraire proposé ne représentait que la moitié de celui qu’il réclamait. Superstitieux, Josef Worlíček, son ami sculpteur, le prévint que

selon une vieille légende « deviendra fou ou mourra bientôt celui qui aura collaboré à l‘horloge ». Ainsi fut créée une œuvre majeure qui influença la création de nombreux autres peintres tchèques. Peu après s’accomplit entièrement la légende que l’ami de Mánes cita en avertissement. En décembre 1871, Mánes succomba à l’évolution d‘une maladie mentale, probablement provoquée par un processus inflammatoire non traité, déclenché dans la tête de ce peintre de génie.

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L’ORIGINAL DU CALENDRIER, OEUVRE DE MÁNES Sous sa forme actuelle, le calendrier fait partie de l’horloge de Prague depuis 1866. Il porte les noms des saints (1) pour chaque jour de l‘année, il indique le numéro d’ordre des jours du mois ainsi que la lettre dominicale (2), sur son pourtour, on trouve les syllabes du cisiojanus (3) – adages en vers servant de moyen mnémotechnique pour les journées importantes de l‘année. Sur le panneau, on voit les scènes de la vie à la campagne, caractéristiques des différents mois de l‘année (4), des motifs figuratifs illustrent les signes du zodiaque (5). Au milieu du panneau, on trouve l’enseigne historique de la Vieille Ville (6).

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REPRESENTATION HISTORIQUE DE L‘HORLOGE L’image provenant des Archives de la Ville de Prague nous montre la gravure de Wilhelm Kandler qui représente l’horloge en 1836. On y aperçoit la version plus ancienne du calendrier, remplacée en 1866 par le tableau de Josef Mánes ainsi que le zodiaque de l’astrolabe sous sa forme figurative plus ancienne.

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EVOLUTION DE L’HORLOGE ET DE SES COMPOSANTS Décor sculptural L’horloge de la Vieille Ville regorge d’éléments sculpturaux. On y trouve des pinacles caractéristiques du gothique, mais aussi d’autres éléments d’architecture et un décor figuratif très riche. Il s’agit d’œuvres originales de tailleurs de pierre ayant travaillé dans l’atelier dirigé par Parler. Peter Parler fut l’un des architectes, sculpteurs et bâtisseurs européens éminents de l’époque du gothique rayonnant. Il arriva très jeune en Bohême, au début des années 1350, sur invitation de Charles IV. Son atelier d’architecture y réalisa une œuvre remarquable. Peter Parler apporta une contribution majeure à la construction de la cathédrale Saint-Guy et du Pont Charles de Prague, il dessina également le château fort de Karlštejn ou la cathédrale Sainte-Barbe de Kutná Hora. Peter Parler fut non seulement un architecte, mais aussi un sculpteur hors pair. Après sa mort en 1399, son atelier poursuivit son travail en Bohême, jusqu’au moment où éclata l’insurrection des hussites. Les guerres hussites signèrent vraisemblablement la destruction d’une partie importante du décor de l‘horloge. L’exécution de Jan Želivský, prêtre et meneur de l’aile radicale des hussites, mis à mort sur l’ordre des échevins de la Vieille Ville dans la cour de l’hôtel de ville en début de l‘été 1422, suscita une riposte armée de ses partisans qui s’attaquèrent au bâtiment de la mairie en y laissant des traces manifestes. La grande majorité des éléments décoratifs réalisés par Parler fut remplacée par des pièces de gothique tardif, issues vraisemblablement à la fin du XVe siècle de l’atelier de Matěj Rejsek, sculpteur et architecte municipal. La thématique de ce décor dans le style de gothique tardif est largement orientée vers l’alchimie ; la symbolique complexe destinée aux initiés peut paraître difficilement intelligible à un observateur contemporain. Une partie des éléments réalisés par Parler se trouve toujours sur le chambranle de l‘astrolabe. C’est probablement de cette époque que date l‘ange (un ange gardien très vraisemblablement) qui 8

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surplombe l‘horloge. Placé sur la corniche, l’ange pointe l’index de sa main droite du haut vers le bas en évoquant ainsi le soin que Dieu porte à tous les êtres qui cheminent sur Terre.

Le mécanisme de l‘horloge A l’intérieur de la construction en pierre, derrière l’astrolabe de l’horloge, un vieux mécanisme continue à faire bouger le Soleil, la Lune et les astres. L’horloge de Prague est la plus ancienne au monde à avoir gardé, comme par miracle, le mécanisme initial en son sein. Au cours des siècles, il fut menacé de destruction à plusieurs reprises, réaménagé à répétition, mais le mécanisme initial reste préservé et en état de marche. Le mécanisme primitif ne fut pas très complexe. Il se composait tout simplement d’un échappement et du foliot qui régulait la chute du poids, d’un tambour qui donnait le mouvement de rotation en le transmettant aux aiguilles du Soleil, de la Lune, du zodiaque, ainsi qu’au carillon. La transmission de la rotation vers les parties tournantes de l’astrolabe : le Soleil, la Lune et le zodiaque, était réalisée d’une manière très simple, à l’aide d‘un simple engrenage avec un pignon commun à 24 dents. Celui-ci faisait tourner trois grandes roues sur les arbres coaxiaux du Soleil, de la Lune et du zodiaque. Le carillon retentissait brièvement avant l’enclenchement de la sonnerie. Il annonçait que la sonnerie allait donner le nombre d’heures et qu’il fallait attentivement écouter le nombre de coups. La sonnerie, enclenchée à partir du carillon, ne se trouvait initialement pas à proximité directe de l’horloge. Elle fut d’abord logée un peu plus haut, au-dessus de la chapelle de l’Hôtel de ville, sur le plancher de la tour. Ce fut le vestige d’un très ancien mécanisme datant probablement des années 1360 que son mauvais état technique rendait peu opérationnel. Le créateur de l‘horloge, Mikuláš de Kadaň, utilisa ensuite le cadre initial, mais fabriqua de nouvelles roues. Plus tard, la sonnerie se lançait à distance, à partir du mécanisme de l’horloge, à l’aide d’une cheville ; une fois enclenché, le cymbalum frappait le nombre d‘heures.


L’ANGE GARDIEN La statue d’ange en pierre fait partie des éléments les plus anciens de l’horloge, elle provient peut-être de l’atelier de Peter Parler. La photographie déposée dans les Archives de la Ville de Prague le représente à l’époque d’avant la Seconde Guerre mondiale. Après l’incendie de l’hôtel de ville de la Vieille Ville en 1945, une copie a remplacé l’original qui, fortement endommagé, est considéré comme disparu.

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« RAPPORT SUR L’HORLOGE DE PRAGUE » DE JAN TÁBORSKÝ Jan Táborský consacra une bonne partie de sa vie à l’horloge de Prague. Il nous légua son écrit de 1570, le premier document historique qui donne une description technique du dispositif. Le manuscrit est déposé dans les Archives de la ville de Prague.

Auteurs de l‘horloge Au cours des six derniers siècles, la face extérieure de l’horloge fut réaménagée à plusieurs reprises. Autour de 1558, elle reçut une nouvelle couverture avec un toit renaissance ; superposé, le petit muret en briques dressé nouvellement derrière la statue de l’ange fut doté d’une fenêtre. A cette époque, le dispositif était entretenu par l’horloger Jan Táborský. Il prit l’horloge en charge depuis 1552 jusqu‘en 1556, et puis encore de 1560 à 1570. Il laissa un livre, écrit à la main sur seize parchemins. Il y décrivit les différents tracas que l’horloge lui avait réservés ainsi que toutes les réparations ou rajouts éventuels. Il fut le premier à avoir exprimé l’hypothèse que l’horloge fut construite par Maître Hanuš autour de 1490. L’idée le tourmentait qu’un monument de cette importance soit l’œuvre d’un inconnu, qu’on ne sache même pas à quel moment il fut élaboré. Son hypothèse commença à se répandre. Le prêtre et l‘historien Bohuslav Balbín enrichit la légende en

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déclarant que Maître Hanuš fut un astronome illustre de l’université de Prague ; et, selon les récits populaires, Maître Hanuš fut aveuglé sur l’ordre des échevins de façon à ne pas pouvoir, une fois l’horloge terminée, reconstruire ailleurs une œuvre aussi somptueuse et exceptionnelle. Les deux histoires sont sans doute inventées, mais Maître Hanuš (Jan Růže) travaillait effectivement à l’époque dans l’enceinte de l‘horloge. Il habita à proximité, dans la rue Jilská, et on l‘appelait « l’horloger des seigneurs de la Vieille Ville de Prague ». Nous ne savons pas s’il apporta des modifications à l’horloge, mais il est certain qu’il l’entretenait et la maintenait en marche. On peut trouver différents récits relatifs à l’origine de l‘horloge. Karel Jaromír Erben, archiviste, écrivain et poète connu du XIXe siècle cite son contemporain, l‘historien Řehoř Volný, qui indique que « le père et le maître de l’horloge de Prague fut Anton Pohl, d‘origine saxonne ». Il convient également de rappeler la légende très répandue évoquant un jeune aveugle qui aurait dû construire l’horloge dans des temps fort reculés.


Aujourd’hui, on penche davantage pour la thèse de Zdeněk Horský, fin connaisseur de l’histoire de l’horloge, qui déclara, en 1967, que son auteur principal fut Jan Šindel, professeur à l’Université de Prague. Selon ses calculs, l’horloge aurait dû ensuite être exécutée par l’horloger du roi, Mikuláš de Kadaň. L’hypothèse de la contribution de Jan Šindel à la création de l’horloge ne repose sur aucune source fiable et de nombreux faits s’y opposent. Pour commencer, rappelons le texte de l’acte du bourgmestre, édicté en 1410, dont la copie a été conservée. Selon lui,

l’auteur de l’horloge est « maître Mikuláš de Kadaň, maître assermenté de notre horloge » et qui indique par ailleurs que « maître Mikuláš construisit l’astrolabe en toute honnêteté, d’une main de maître, en respectant l’esprit naturel de la ville et pour la satisfaction de toute la communauté ». La construction d’un astrolabe de ce type archaïque n’était pourtant pas trop complexe en soi, et n’a rien à voir avec la rigueur nécessaire pour fabriquer un astrolabe astronomique. De plus, les irrégularités relevées par rapport au bon calibrage des parallèles dessinés sur l‘horloge comprom-

VUES DETAILLEES DE PIECES FORGEES SUR LE MECANISME DE L‘HORLOGE Le mécanisme de l‘horloge atteste d’un travail rigoureux des forgerons du Moyen Age et des époques plus récentes. HORLOGE ASTRONOMIQUE

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VUE DE L’INTERIEUR Au cœur de la construction en pierre adossée à la tour de l’hôtel de ville se trouve un bijou de la technologie. C’est le vieux mécanisme de l’horloge de Prague. Sa version originale fut élaborée par l’horloger Mikuláš de Kadaň dès 1410. Aujourd’hui, l’horloge de Prague est la plus ancienne au monde à disposer encore du mécanisme initial en état de marche.

ettent sérieusement l’idée de la participation du mathématicien et astronome que fut Jan Šindel. Par ailleurs, la théorie de Horský met au second plan les capacités exceptionnelles du maître horloger Mikuláš de Kadaň qui n’aurait toutefois pas pu acquérir son titre sans disposer de la formation et de connaissances techniques nécessaires, ainsi que du tour de main pour construire le mécanisme de l’horloge ainsi que l’astrolabe.

Décor sculptural En 1659, après la Guerre de Trente ans, quand l’horloge connut différentes réparations, de nouvelles statues baroques en bois furent placées sur sa face extérieure. Mobiles, trois d’entre elles furent montées sur la corniche

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dans la rangée supérieure pour compléter la statue polychromée la plus connues de l’horloge, celle de la Mort. Le squelette souriant est une allégorie à la mort bienheureuse qui mène vers le salut, et la statue ne peut qu’approuver une telle mort en opinant de la tête. Toutes les heures, en retournant le sablier, elle arrête symboliquement le cours du temps tandis que le son du glas rappelle que le temps nous est compté et arrivera nécessairement à échéance. La mort qui nous rattrape tôt ou tard ne devrait pas être une mort accablante, quand les grands péchés conduisent à la damnation au moment du jugement dernier et provoquent la chute en enfer. Les autres statues du rang supérieur sont des allégories aux trois pires péchés de l’homme : l’orgueil, l’avarice et l‘envie.


En contrepoint de l’allégorie des péchés, on trouve dans la rangée basse trois autres statues. A la différence des premières, elles symbolisent les plus belles vertus humaines – la compassion, la générosité et la modestie. Les statues sont vêtues dans un style oriental pour que les allégories des vices ne puissent pas être prises pour des caricatures d’hommes importants de ce temps. A côté du calendrier, là où se dresse aujourd’hui l’archange Michaël, bouclier et épée à la main, se trouvait jusqu’à la fin du XVIIIe siècle la figure de Chronos qui symbolisait le temps éternel, l’antithèse de l’allégorie de la Mort, qui rappelle au contraire le temps limité de la vie humaine. Rappelant celle d’un vieillard, sa silhouette peut être aperçue sur certaines images historiques de la mairie de la Vieille Ville. C’est probablement parce qu’elle était abîmée que cette statue fut remplacée par celle de l’ange Michaël, gardien de la porte sud du paradis. Initialement, cette statue se trouvait sur le bâtiment de la garde municipale ; après sa démolition, elle fut transférée à l‘horloge.

Statues des apôtres La mise en place des apôtres a dû constituer un moment important dans la vie de l‘horloge. Nous manquons de toute trace de cet évènement, mais le livre de l’historien Bohuslav Balbín de 1682 indique, qu’on « n’y trouve pas de petits jouets ou miniatures, pas de petites vielles dansant avec la Mort, pas de jeu de minuscules violons d’ange (...), pas de bergers ou bergères défilant sur des petites planches, admirées par les petits garçons, enfants sans raison, et les paysans qui amènent du foin et du bois en ville ». A la fin du XVIIe siècle, les apôtres n’étaient toujours pas présents. En revanche, le récit de voyage d‘Emanuel Swedenborg, datant de 1733, mentionne dans la partie décrivant l’horloge « différentes statues sur supports et derrières de petites portes ». On peut dès lors supposer que les apôtres devaient être installés entre 1680 et 1733. Il n’est pas tout à fait clair à quel moment. Possiblement en été 1723, lors du couronnement

d’un souverain très pieux, empereur Charles VI, devenu roi tchèque. Il séjourna en Bohême pendant quatre mois, accompagné de l‘impératrice Elisabeth Christine ainsi que de sa fille de six ans, la jeune Marie-Thérèse. Les échevins de la Vieille Ville, et notamment le bourgmestre Jan Kašpar Prandt, ressentirent probablement le besoin de doter l’horloge, regorgeant de signes athées et alchimistes, d’un motif catholique prégnant que les apôtres incarnèrent à la perfection. Au cours du XIXe siècle, les statuettes initiales des apôtres disparurent progressivement. Trois d’entre elles – Saint Pierre, Saint Paul et Jésus Christ – furent ensuite retrouvées et abondèrent les collections du Musée municipal. En 1865, les statues manquantes furent remplacées par de nouveaux apôtres. Leur auteur fut Eduard Veselý, un sculpteur de renom de la deuxième moitié du XIXe siècle. A l’heure actuelle, l’horloge dispose d’un troisième ensemble d’apôtres. Ils furent créés en 1948 par le sculpteur et marionnettiste Vojtěch Sucharda pour remplacer l’œuvre d‘Eduard Veselý, dont les statuettes furent dévorées par les flammes le 8 mai 1945, dans les dernières heures de la Seconde Guerre mondiale.

Evènements récents Au cours des années 1864 et 1865 l’horloge subit la plus grande réparation de tout temps. Elle nécessita l’arrêt complet de l’horloge qui se trouva en très mauvais état à la suite des décennies de fonctionnement interrompu. La rénovation de l’horloge fut réalisée de façon respectueuse de son caractère historique unique. Les artisans d’époque conservèrent le mécanisme initial, en lui appliquant quelques aménagements qu’ils jugèrent nécessaires. Ils enlevèrent son système de régulation peu précis et le remplacèrent par un chronomètre d’une grande précision, placé sur son côté. C’est lui qui garantit que l’engrenage du mécanisme fasse un tour toutes les minutes. Le panneau de l’astrolabe, initialement assemblé à partir de pièces de tôle rectangulaires, fut refait, de même que les aiguilles et le zodi-

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LES STATUES PLACEES A L’EXTERIEUR DE L‘HORLOGE Au XVIIe siècle, la façade de l’horloge accueillit les statues baroques, allégories de vertus et vices humains. Certaines des statues furent modifiées au XXe siècle par le sculpteur Vojtěch Sucharda – il plaça entre leurs mains de nouveaux attributs, en les privant de leur signification initiale. 1 – Le Vaniteux (initialement l’allégorie de l‘Orgueil) 2 – l’allégorie de l‘Avarice 3 – la Mort 4 – l‘Epicurien (initialement l’allégorie de l‘Envie) 5 – le Scribe (initialement l’allégorie de la Compassion) 6 – l‘archange Michaël 7 – l‘Astronome (initialement l’allégorie de la Générosité) 8 – le Chroniqueur (initialement l’allégorie de la Modestie)

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IMAGES ANCIENNES DES STATUES Sur les photographies provenant des Archives de la Ville de Prague, on voit deux statues : les allégories de la Modestie (A) et de la Compassion (B) – avant la réparation de l’horloge en 1911. Plus tard, le sculpteur Sucharda plaça entre leurs mains un livre, une plume et un rouleau, en modifiant ainsi la symbolique des statues : la figure de la Modestie s’est transformée en Chroniqueur et la Compassion a été métamorphosée en Scribe.

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LES PREMIERS APOTRES DE L‘HORLOGE Les tous premiers apôtres furent installés avant les années 1750. Les statuettes baroques disparurent, il n’en reste aujourd’hui que trois – Jésus-Christ (1), Saint Pierre (2) et Saint Paul (3) ; elles sont déposées au Musée municipal de la Ville de Prague.

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LES APOTRES CREES PAR EDUARD VESELÝ Lors de la grande réparation de l’horloge en 1865, les statues baroques des douze apôtres, disparues, furent remplacées par des figurines néogothiques, œuvre du sculpteur Eduard Veselý. Certaines d’entre elles exécutaient divers gestes : Saint Jean donnait la bénédiction, Saint Thomas hochait la tête, Saint Paul opinait du chef et Saint Pierre levait le bras au ciel. Ces statues ont été préservées jusqu‘en 1945 et furent ensuite englouties par les flammes lors des tirs nazis contre la mairie de la Vieille Ville. Leurs images sont sauvegardées dans les Archives de la Ville de Prague. A – Saint André B – Saint Jean C – Saint Simon D – Saint Thomas E – Saint Jacques le Mineur F – Saint Paul G – Saint Pierre H – Saint Jacques le Majeur I – Saint Mathias J – Jésus Christ K – Saint Barthélémy L – Saint Mathieu

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aque. Le zodiaque initial qui représentait des signes sous forme figurative, fut remplacé par un nouveau zodiaque – par erreur, il s’agit d’un cercle qui correspond à celui de l’équateur sur l’astrolabe, il est donc considérablement plus petit. Pour réparer cette erreur, dès 1866, un pourtour en bandelettes d’acier fut placé sur le zodiaque ; lui a le bon diamètre. En 1882, des lignes transversales furent ajoutées qui divisent le zodiaque en portion de 5 degrés. C’est ainsi, par erreur, qu’est apparu cet élément caractéristique et décoratif de l’horloge : « l’échelle » dorée qui entoure le zodiaque.

En 1882, l’horloge fut dotée d’un coq doré qui lance son cocorico à la fin du passage des apôtres ; en même temps, il bas trois fois des ailes et penche trois fois la tête en arrière. Aujourd’hui, il est difficile d’imaginer l’horloge et ses éléments en pierre comme polychromés à l’origine. Non renouvelées au cours des siècles suivants, les couleurs ont disparus des décors en pierre. Une ordonnance de l’empereur Joseph II interdisait la polychromie des statues. Nous ne retrouvons quelques restes de couleurs rouge et ocre que dans les recoins cachés des chambranles en pierre.

COMPARAISON DES DEUX VERSIONS DU ZODIAQUE Le Musée de la Ville de Prague abrite toujours le zodiaque de l’astrolabe de l’horloge qui portait les représentations figuratives. Il fut remplacé en 1866 par une nouvelle version, où les signes du zodiaque répondent aux symboles astronomiques. Ce zodiaque, serti de sa petite échelle caractéristique sur le pourtour, constitue aujourd’hui l’élément le plus caractéristique de l‘horloge.

Le milieu du XXe siècle fut le moment le plus bouleversant dans l’histoire de l’horloge de la Vieille Ville. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, le 8 mai 1945 en matinée, un incendie colossal ravagea l’horloge ainsi que le bâtiment de l’hôtel de ville. Il fut provoqué par des tirs d’artillerie dirigés contre le bâtiment et sa tour, notamment du haut de la plaine de Letná. C’est en partant de la chapelle voisine que le feu se propagea à l’horloge : les flammes atteignirent d’abord les apôtres en bois pour descendre ensuite plus bas, vers le mécanisme de l’horloge. Brûlèrent les 18

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planchers en bois supportant les apôtres et le mécanisme, celui-ci se retrouva au milieu de poutres et de fragments d’apôtres en feu, ses paliers en laiton fondirent dans les braises. Après la guerre, une partie de la marie, dévastée par le feu, fut démolie, on projetait de construire une horloge nouvelle, moderne. Le sculpteur Vojtěch Sucharda avait l’intention de doter l’horloge de seize statues nouvelles répondant davantage à l’air du temps et capables de faire différents mouvements. Pour lui, les statues initiales


sur la face extérieure de l‘horloge relevaient d’une faute de goût – il n’a probablement pas saisi leur intérêt premier. Heureusement, les aménagements proposés ne virent jamais le jour. C’est l’historien Václav Vojtíšek qui contribua largement à la préservation de l’horloge et obtint la réparation de l’ancien monument précieux qui reprit sa forme d’avant l‘incendie. Le toit ainsi que la petite tour au-dessus de l’horloge brûlèrent, furent reconstruits, le décor en pierre réparé et les copies des statues baroques de la façade remises en place. Vojtěch Sucharda ne parvint pas à imposer son idée de réaménagement de l’horloge, mais c’est lui qui réalisa dans ce temps d’après-guerre les nouveaux apôtres en suivant son projet original. Le mécanisme de l’horloge fut réparé et reçut un nouveau système de propulsion. Celle-ci fut assurée par des poids soulevés par des moteurs

POIDS ET TAMBOURS AVEC CORDES POUR PROPULSER L‘HORLOGE En 2018, la réfection générale de l’horloge est réalisée. Les travaux qui ont pris deux mois ont permis de restituer l’ancien système de propulsion : il est constitué de poids accrochés aux cordes en chanvre qui font tourner les tambours en bois.

électriques et suspendus à l’aide de chaînes là où se trouvaient auparavant les tambours reliés par des cordes. Mais même ce système de propulsion finit par être remplacé lors de la rénovation réalisée en 2018. A ce moment, le mécanisme de l’horloge fut non seulement restauré, nettoyé et décapé, mais il retrouva son système de propulsion initial. On est ainsi revenu aux poids en pierre, suspendus sur des cordes en chanvre qui font de nouveau tourner les tambours en bois. Sans aucun doute, l’horloge de Prague est le lieu le plus visité et le plus admiré au monde. Toutes les heures, plusieurs centaines de touristes venus du monde entier se massent devant elle en attendant le défilé des apôtres. Plusieurs millions d’admirateurs la découvrent tous les ans.

L’INCENDIE DE L‘HORLOGE En mai 1945, l’insurrection de Prague transforma la place de la Vieille Ville en champ de bataille. Comme en témoigne une photo des Archives de la Ville de Prague, l’hôtel de ville de la Vieille Ville et l’horloge séculaire furent pris pour cible par les occupants. Ce fut la plus grande catastrophe qui frappa ce bâtiment historique.

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HOTEL DE VILLE DE LA VIEILLE VILLE EN MAI 1945 La photographie provenant des Archives de la ville de Prague documente la destruction de l’hôtel de ville pragois et de son horloge le 8 mai 1945. Le vieux bâtiment qui avait subi des tirs d’artillerie nazie fut considérablement abîmé. Une grande partie de la mairie fut démolie après la guerre, l’horloge fut rénovée pour retrouver son aspect historique.

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LES APOTRES D’AUJOURD‘HUI Les statues des douze apôtres qui décorent l’horloge de Prague aujourd’hui, furent créées dans l’après-guerre. Elles font partie du dispositif depuis 1948. C’est le sculpteur Vojtěch Sucharda qui les tailla selon sa conception originale. 1 – Saint Philippe 2 – Saint Mathias 3 – Saint Pierre 4 – Saint Barthélémy 5 – Saint Simon 6 – Saint Paul 7 – Saint Jacques le Mineur 8 – Saint André 9 – Saint Judas Thaddée 10 – Saint Barnabé 11 – Saint Jean 12 – Saint Thomas A titre de curiosité, l’ensemble des statuettes réalisées par Vojtěch Sucharda comptait quatorze figurines en tout. Deux d’entre elles – Jésus Christ (A) et Judas (B) – n’ont finalement jamais été installées.

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CHRONOLOGIE DE L‘HORLOGE XIVe siècle – construction de la tour La tour de l’hôtel de ville est en construction. Une fois le chantier terminé, on ignore à quel moment précisément, un mécanisme est installé à l’intérieur de la tour, permettant de sonner l’heure entière. Lorsque l’horloge est créée en 1410 par Mikuláš de Kadaň, le mécanisme n’est plus entièrement en marche. L’horloger entreprend des aménagements : la sonnerie est équipée de nouvelles roues dentées, elle est commandée par le mécanisme de l‘horloge. 1410 – date de création de l‘horloge La création de l’horloge par l‘horloger Mikuláš de Kadaň est annoncée dans l’acte du bourgmestre en date du 9 octobre 1410. 1475 à 1497 – aménagements de l’horloge dans le style du gothique tardif L’horloge est prise en charge par Maître Hanuš (Jan Růže). L’architecte et le sculpteur Matěj Rejsek réalise un nouveau décor en pierre taillée de la face extérieure de l‘horloge, dans le style gothique dit des Jagellon. 1552 – 1570 – Jan Táborský, horloger L’histoire fait entrer sur scène Jan Táborský qui devient l’un des horlogers pragois les plus en vue. Il s’occupera de l’horloge pendant presque deux décennies (entre 1556 et 1560, il est remplacé temporairement par Václav Tobiáš). autour de 1558 – toit au-dessus de l‘horloge On dresse au-dessus de l’horloge un toit surmonté d’une tourelle et d’un volet, deux cadrans solaires sont apposés sur les piliers qui flanquent l‘horloge. 1629 – la sonnerie quitte la tour pour être installée au sein même de l‘horloge La sonnerie placée dans la tour vient d’être installée à côté du mécanisme de l’horloge ; jusqu’alors la cloche était actionnée par une cheville reliée au mécanisme. 1659 – les statues baroques sont placées sur la façade Les statues en bois sont placées à l’extérieur de l‘horloge. Leur auteur vient vraisemblablement du cercle autour de Jan Jiří Bendl – sculpteur qui créa la colonne mariale, dressée en 1652 sur la place de la Vieille Ville. 1723 – les apôtres de l‘horloge C’est probablement à cette époque, à l’occasion du couronnement de Charles VI, devenu roi tchèque, que les apôtres font leur première apparition à l‘horloge. 1787 – un monument au bord de la destruction En 1784, les quatre villes pragoises historiques se réunissent, l’hôtel de ville de la Vieille Ville est étendu et réaménagé. Hors service, l’horloge est destinée à être démontée et revendue comme un tas de ferraille. C’est le vice-bourgmestre Fischer qui empêche son démantèlement. 1791 – l’horloge est réparée par Ferdinand Londensperger 1824 – l’horloge tourne au ralenti Au cours des années 1824 – 1838, l’horloge n’était actionnée qu’à des moments solennels. Quand la rénovation de l’hôtel de ville dans le style néogothique est lancée en 1838, l’horloge ne tourne plus. 1842 – l’horloge de nouveau menacée La tour de l’hôtel de ville de la Vieille Ville commence à se fissurer après une rénovation entreprise dans le style néogothique, l’administration municipale ordonne dès lors la déconstruction de la tour. On discute toutefois des possibilités de sa préservation.

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L’HORLOGE ATTEND UNE GRANDE REPARATION L’une des plus anciennes photographies conservée de l’horloge de la Vieille Ville représente le monument avant les grands travaux des années 1864 – 1865. L’image fait partie des collections de l’Institut d’histoire de l’art de l’Académie des Sciences de la République tchèque.

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1846 – l’horloge est sauvée Des fragilités dans la construction des parties les plus anciennes de la mairie sont repérées. La préservation de la tour et de l‘horloge est définitivement actée. On débat en parallèle de la rénovation de la partie extérieure de l‘horloge. 1864 – 1865 – grande réparation de l‘horloge Dès 1838, l’horloge ne fonctionne plus. Sa réparation est décidée. Le 1er septembre 1864, tout le mécanisme est démonté et part en atelier. On réalise quelques aménagements, mais le mécanisme initial est sauvegardé dans son ensemble. On enlève le foliot, l’ancien régulateur de la marche de l’appareil, et on fabrique un nouveau chronomètre, précis, selon les dessins du concepteur Romuald Božek. Le sculpteur Eduard Veselý taille de nouveaux apôtres abrités dans une pièce dotée de nouvelles fenêtres. Sur les flancs de l’horloge, la société L. Hainz installe deux horloges avec un cadran transparent et rétroéclairage. 1866 – nouveau calendrier Le peintre Josef Mánes crée un nouveau calendrier pour l’horloge de la Vieille Ville. 1880 – une nouvelle réfection de l‘horloge En novembre, une grande réfection de la tour est entamée. La société L. Hainz démonte l’horloge et les apôtres et les emmène dans ses ateliers. Réparé, le mécanisme est remis en service le 31 décembre 1882. L’original du calendrier de Mánes est remplacé par une copie réalisée par Emanuel Krescenc Liška. Le cercle du zodiaque porte les traits marquant la distance de 5 degrés ce qui donne naissance à la fameuse « petite échelle ». La niche audessus les fenêtres des apôtres abritera désormais un coq, œuvre de František Kamberský, salarié de la société L. Hainz.

LE COQ MECANIQUE Ceci est la figure originale du coq placé sur l’horloge de la Vieille Ville. C’est depuis 1882 qu’il décore la façade du bâtiment. Il a un rôle très clair : son chant et ses mouvements mettent fin au passage des douze apôtres à chaque heure entière. Mais il symbolise également la naissance du jour : il chasse la mort et les démons de la nuit.

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1911 – réfection des statues baroques et rénovation de l‘horloge Le sculpteur Vojtěch Sucharda a refait les statues placées sur la façade de l’horloge : le Turc situé dans sa partie basse a récupéré une plume et un rouleau de papier, celui qui se trouve à droite de la Mort tient désormais un luth à la main. La signification initiale des statues s’en est trouvé altérée : l‘allégorie de la Compassion s’est transformée en « Scribe », la figure de l’Envie est devenue un « Epicurien ». Les éléments en pierre sont rénovés, le calendrier réparé. Le mécanisme de l’horloge est démonté et remonté. L’horloge a perdu les dernières traces du cadran solaire, enlevé définitivement. 1912 – nouvel éclairage des cadrans latéraux L’éclairage initial au gaz des cadrans latéraux de l’horloge est remplacé par un éclairage électrique. le 8 mai 1945 – incendie de l’hôtel de ville de la Vieille Ville L’hôtel de ville de la Vieille Ville subit une attaque nazie. Le bâtiment devient cible de tirs, un incendie se déclare. L’horloge est gravement atteinte dans toutes ses parties : le mécanisme est abîmé, les statuettes des apôtres consommées par le feu, les éléments taillés sur la façade sont affectés, de même que le calendrier de Liška. 1945 – 1948 – réfection de l’horloge dans l’après-guerre Toutes les parties de l’horloge sont démontées et rénovées, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur. Le peintre Bohumír Číla réalise une nouvelle copie du panneau de calendrier, le sculpteur Vojtěch Sucharda crée de nouveaux apôtres. L’ange gothique situé entre les fenêtres des apôtres est remplacé par une copie. Le système de propulsion de l’horloge réparée est remplacé par un dispositif de remontage automatique, les tambours en bois perdus sont remplacés par des pignons. La sonnerie est également modifiée : la sonnerie réglée selon l’ancienne heure tchèque est remplacée par celle de l’heure d’Europe centrale (ordinaire).

REFECTION DE L‘HORLOGE APRES LA GUERRE La rénovation du bâtiment abîmé prit trois ans. Les parties du mécanisme affectées par le feu furent réparées et nouvellement montées par les frères Rudolf et Jindřich Vesecký. Refait à neuf, le mécanisme de l’horloge se mit de nouveau à tourner le 1er juillet 1948.

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1966 – poursuite de la réfection des statues baroques De même qu‘en 1911, le sculpteur Sucharda modifie les attributs de statues placées sur la façade de l’horloge. Le Turc à droite du calendrier tient désormais une longue vue à la main, un autre Turc, son voisin, un livre. L’allégorie de la Générosité devient ainsi un « Astronome » et la figure de la Modestie se métamorphose en un « Chroniqueur ». 1993 et 2005 – réparation de l’horloge en atelier 2018 – révision générale de l’ensemble de l‘horloge On retire de l’horloge le système de remontage automatique fonctionnant avec des poids fixés sur des chaînes ; le projet de l’horloger Petr Skála permet de reprendre le système de propulsion par poids en pierre suspendus sur des cordes de chanvre enroulées autour de nouveaux tambours en bois. Le remontage automatique de l’appareil est dissimulé à l’intérieur des tambours. Tous les éléments en pierre taillée de l’horloge sont entièrement rénovés, de même que les statues en bois de la façade et les apôtres. D’après les photographies historiques, les vitraux de la chambre abritant les apôtres sont remis en place, est reprise la peinture des cieux en bleu foncé et des étoiles dorées dans la sous-pente du toit au-dessus des fenêtres des apôtres et dans la pièce où ils sont rangés. Le peintre Stanislav Jirčík réalise une nouvelle copie du panneau de calendrier: depuis 1882, c’est la troisième copie de l’œuvre de Mánes.

LE MECANISME DE L’HORLOGE AU COURS DE LA REPARATION DE 2018 Lors des grands travaux de 2018, le mécanisme de l’horloge fut entièrement démonté et transporté pour une rénovation complète dans l’atelier de l’horloger. La photographie de gauche offre une vue exceptionnelle, on ne peut voir le mécanisme sous cet angle que lorsqu’il est sorti de son emplacement habituel, puisque cette partie est autrement cachée derrière le panneau astronomique. L’autre photographie montre la deuxième face du mécanisme, telle qu’elle se présente à la vue dans le local abritant l’appareil de l’horloge à l’intérieur de l’hôtel de ville de la Vieille Ville.

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